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TORONTO (Ontario), le 20 décembre 2017
Q. Quel est pour Toyota l’élément moteur principal de son programme de conduite autonome?
Kuzumaki : « Toyota souhaite une mobilité sécuritaire et améliorée pour tous. Nous voulons que les gens n’aient plus à s’inquiéter du risque d’accident. Quand quelqu’un monte dans une voiture, l’idéal serait de ne plus avoir à lui dire “Sois prudent”, mais plutôt “Amuse-toi bien”. Avec la conduite autonome, nous nous sommes fixé l’objectif de réduire le nombre de décès dans les accidents de la route, qui s’élève actuellement à 1,3 million par an dans le monde. »
Pratt : « De plus, tous ceux qui sont aujourd’hui dans l’incapacité de conduire – vraiment tous, personnes âgées et handicapés physiques compris – pourront aller librement où bon leur semble, en toute sécurité. »
Q. Comment comptez-vous y arriver?
Kuzumaki : « La mobilité future, telle que nous l’envisageons, repose sur le principe suivant : la voiture vous aide à rester en sécurité. Elle veille sur vous comme le ferait un équipier. C’est pourquoi nous avons appelé cette démarche le “Mobility Teammate Concept”. »
Pratt : « L’intelligence artificielle (IA) d’une voiture s’améliorera au fil du temps, à mesure qu’elle apprendra les habitudes et les préférences du conducteur et des passagers. L’IA respectera parfois ces préférences, tandis qu’à d’autres moments elle avertira le conducteur. La voiture et son conducteur évolueront ensemble et deviendront inséparables. »
Q. En pratique, comment cela- fonctionne-t-il?
Pratt : « Toyota distingue deux types d’autonomie : le mode “Chauffeur” et le mode “Gardien”. Le mode “Chauffeur” correspond à une conduite autonome lorsque le conducteur ne souhaite pas ou ne peut pas prendre le volant. En mode “Gardien”, la conduite est assurée par une personne, aidée des systèmes d’assistance évolués. Il est important de souligner que cette approche laisse le choix au conducteur. Même lorsque la voiture est entièrement autonome, le conducteur peut toujours reprendre le volant s’il le souhaite et profiter du plaisir de conduire. »
Kuzumaki : « Ces dispositifs de sécurité évolués ne sont qu’un élément de l’équation. Notre démarche repose sur deux axes : en plus de développer des technologies pointues, nous cherchons à démocratiser les caractéristiques de sécurité sur l’ensemble de la gamme, en les rendant plus abordables. Ce n’est qu’une fois la totalité des modèles équipés de ces caractéristiques, y compris ceux d’entrée de gamme, que la différence sera perceptible. Nous sommes fiers que nos systèmes d’évitement des accidents équipent aujourd’hui 92 % des voitures que nous vendons en Europe, ce qui nous rapproche de notre objectif de zéro accident. »
Q. Cela semble prometteur, mais quand verrons-nous tout cela sur la route?
Kuzumaki : « En 2020, nous lancerons le Highway Teammate, un système de conduite autonome sur autoroute, capable d’y entrer et d’en sortir, d’effectuer des dépassements et de changer de voie. Si le conducteur le souhaite, naturellement. Conformément à notre philosophie, le système collaborera toujours avec lui. »
Q. Alors, pas de conduite automatisée sur les routes normales?
Pratt : « Au début de la décennie 2020, nous comptons introduire le système “Urban Teammate”, un système de conduite autonome pour les routes normales. Grâce à son IA plus évoluée, il permet une plus grande autonomie de conduite.
Q. Quelle est votre position sur la collaboration et la concurrence dans ce domaine?
Pratt : « Pour ce qui est de la collaboration, nous restons très ouverts. La concurrence et la collaboration doivent être gérées avec prudence, car nous sommes dans un contexte en constante évolution. »
Kuzumaki : « Tout à fait. Nous devrions définir clairement les domaines où les entreprises doivent se concurrencer, ou au contraire collaborer. Par exemple, la cartographie de haute précision est un domaine propice au partage des données. La collaboration est importante, mais la concurrence aussi, car elle donne un coup de pouce à l’innovation. »
Q. Quelle est la place de l’Institut de recherche Toyota (TRI) dans la structure de R et D mondiale de Toyota?
Pratt : « Chez Toyota, le kaizen (l’amélioration continue) est au cœur de tout ce que nous faisons. Cela reste notre fondement et l’une de nos plus grandes forces. Toutefois, nous vivons une époque sans précédent qui nécessite des approches complémentaires. Dans ce domaine particulier, il ne suffit pas d’y aller à petits pas. Il faut avancer par grands bonds, ce qui mène souvent à l’échec. Avec de la chance, si l’on a eu le courage de persévérer malgré les échecs, on finit d’un coup par y arriver. La mission du TRI consiste à explorer différentes voies et à faire ces sauts pour Toyota. En plus du travail que nous réalisons nous-mêmes, nous avons récemment créé Toyota AI Ventures, un fonds de capital-risque destiné à encourager l’esprit d’entreprise et à financer les jeunes pousses travaillant dans les données, l’intelligence artificielle, la conduite autonome, l’apprentissage automatique, la robotique... »
Q. Comment fixez-vous le seuil maximal de sécurité à atteindre? Comment savoir si la sécurité est suffisante?
Pratt : « L’écriture du logiciel est assez facile. Le plus difficile, c’est de prédire le comportement humain. La voiture va-t-elle tourner à droite ou à gauche? L’enfant va-t-il courir après son ballon jusque sur la route? Nous élaborons un modèle statistique fondé sur les données issues de comportements humains réels. À partir de là, nous créons un environnement virtuel et nous y testons notre logiciel d’autonomie. Mais cela ne suffit pas. Nous simulons des milliers de kilomètres dans des conditions de circulation pires que celles du monde réel. Enfin, nous complétons ces simulations par des essais en conditions réelles, car la route reste le meilleur banc d’essai. En combinant la simulation et la conduite en conditions réelles, nous comptons relever le défi que s’est fixé Toyota, soit d’atteindre le billion de miles. »
Kuzumaki : « Il est crucial que le véhicule soit complètement sécuritaire par lui-même – c’est-à-dire sans nécessiter d’interaction avec l’infrastructure ou avec d’autres véhicules. Ainsi, il pourra naviguer sans risque en cas d’interruption des services à la suite d’une catastrophe naturelle, par exemple. Dans la mesure où ces véhicules seront confrontés à des conditions météorologiques et de circulation extrêmes, le système a besoin d’une multitude de capteurs différents et complémentaires. Le LiDAR, par exemple, fonctionne mal sous la neige. »
Q. En conclusion, quels sont les défis qui restent à relever pour l’avenir de la mobilité?
Kuzumaki : « Tout d’abord, la législation. Si nous voulons introduire la conduite autonome en toute sécurité dans différentes régions du monde, il faudra harmoniser la réglementation. En deuxième lieu, la conduite autonome nécessite la transmission d’énormes quantités de données qu’il est important de protéger, en particulier les données personnelles. »
Pratt : « Parvenir au niveau 5 d’autonomie est incontestablement l’un des principaux défis restants. Pour l’instant, l’intelligence artificielle ne possède pas le niveau de raisonnement humain suffisant. Je défie quiconque d’annoncer à quel moment il atteindra le niveau 5. L’acceptation par le grand public est un autre défi. Tout le monde n’est pas prêt à adopter l’intelligence artificielle et la conduite autonome. Toutefois, on commence à observer une évolution des mentalités. Vous vous souvenez de l’époque où les ascenseurs étaient actionnés par un garçon d’ascenseur? Aujourd’hui, tout le monde trouve normal d’appuyer sur un bouton. Nos véhicules autonomes doivent absolument être sécuritaires et se comporter mieux qu’avec un conducteur humain, si nous voulons que les mères de famille leur confient la vie de leurs enfants. »
Pour en savoir plus sur la vision de Toyota pour la conduite autonome, voir : http://automatedtoyota.com
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